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La nouvelle étoile scintillante de l’IA générative est fascinante, mais nous devons équilibrer notre soif d’aventure en matière d’IA avec une mesure de pragmatisme

Par Claus Jepsen, Chief Product & Technology Officer, Unit4

Le récent lancement de DeepSeek a été accueilli avec un grand enthousiasme, accaparant de nombreuses unes de l’actualité. Et bien que la technologie sur laquelle repose cette nouvelle itération de l’IA générative soit incontestablement impressionnante, son arrivée résume à bien des égards l’état de l’IA aujourd’hui : elle est intéressante, prometteuse et suscite peut-être un engouement légèrement excessif.

Je me demande si ce n’est pas en partie une problématique générationnelle. La génération des baby-boomers a été la première à bénéficier d’importantes opportunités d’emploi dans l’industrie des technologies de l’information, et a appris à ses dépens les leçons du monde des affaires. Les projets devaient être justifiés au regard de leur coût, car la technologie était coûteuse et devait être associée à un robuste scénario de retour sur investissement. Le déploiement des projets était lent, car, en plus d’être complexes, ces projets devaient être alignés avec un besoin particulier de l’entreprise et recevoir l’aval des intervenants concernés. La « dérive des projets » était une crainte fondée, et la relation entre le service informatique et « l’entreprise » était souvent tendue et complexe, caractérisée par une méfiance réciproque.

Aujourd’hui, la situation est quelque peu différente. L’industrie des technologies de l’information est colossale, le classement Fortune 50 est rempli d’éminentes marques technologiques et d’autres secteurs s’émerveillent des marges bénéficiaires du secteur des logiciels. Cette situation est peut-être idéale pour les entreprises de la Silicon Valley et les investisseurs en capital-risque de Sand Hill Road, désespérément à l’affût de la prochaine innovation incontournable ; dans le monde réel des services informatiques des entreprises, toutefois, les choses doivent être envisagées avec plus de prudence ainsi qu’une mesure appropriée de pragmatisme, voire de circonspection.

Et c’est ce qui nous ramène à l’IA. L’IA est loin d’être une nouveauté, et ses racines remontent loin, jusqu’au milieu du siècle dernier. Et jusqu’à présent, malgré tout l’engouement qu’elle suscite, elle n’a joué qu’un rôle modéré dans le monde des affaires. Et, bien que le succès d’outils tels que ChatGPT l’ait propulsée sous les feux de la rampe, elle demeure confrontée à des problèmes familiers. Son déploiement à des fins concrètes est coûteux, son développement nécessite (du moins, jusqu’au lancement de DeepSeek) une immense puissance de calcul et elle fournit des réponses qui sont souvent discutables. Elle suscite par ailleurs de sérieuses questions au regard de la responsabilité juridique et des droits d’auteur.

Un exercice d’équilibre

Nous devons parvenir à un juste équilibre entre l’enthousiasme et l’expérimentation que suscite l’IA aujourd’hui et une saine mesure de pragmatisme. Nous devons commencer par élaborer une analyse de rentabilité et nous demander comment l’IA peut nous aider. Quelle est notre mission ? Où se situent nos opportunités et nos risques stratégiques ? Bien, comment l’IA peut-elle nous aider ? Aujourd’hui, ce postulat est trop souvent mis en avant : « L’IA, c’est génial. Voyons ce qu’on peut en faire ».

Aujourd’hui, je considère que l’IA est une opportunité phénoménale, mais les scénarios d’utilisation associés doivent être définis. L’IA excelle dans le traitement des tâches de calcul colossales, dont les humains s’acquittent avec difficulté. Elle peut étudier des modèles et détecter des tendances plus rapidement que nos faibles cerveaux humains. Elle ne se lève pas du mauvais pied le matin, ne fatigue pas facilement et n’a pas besoin de passer deux semaines en vacances dans la Méditerranée tous les ans. Elle nous étonne par l’excellence avec laquelle elle s’acquitte d’un nombre limité de tâches créatives, telles que la création d’images, de musique, de poèmes et de vidéos. Toutefois, elle pèche par son absence de vision d’ensemble. Elle ne connaît pas la prudence qui permet aux humains d’éviter le danger, et elle n’a aucune expérience du monde réel du travail, qui est constitué d’un immense éventail de variables, parmi lesquelles figurent notamment l’humeur et la perception humaines.

Aujourd’hui, l’IA excelle à la périphérie : elle gère des robots capables de répondre à des questions prévisibles ou des agents qui nous aident à accomplir des tâches routinières plus rapidement que nous ne le ferions. L’automatisation des processus robotiques a été une aide utile et a transformé la dynamique des interactions entre les humains et les ordinateurs : nous pouvons désormais nous décharger des tâches fastidieuses, telles que le traitement de demandes de cartes de paiement ou de notes de frais, et privilégier notre réflexion créative.

Il subsiste toutefois également des zones grises. L’IA conversationnelle est un projet en cours ; toutefois, nous devrions rapidement constater des améliorations issues de l’apprentissage continu itératif de nos amis binaires. Bientôt, peut-être serons-nous impressionnés par la capacité de l’IA à deviner nos prochaines décisions et à nous suggérer des approches plus intelligentes pour accomplir notre travail. Similairement, il est possible pour l’IA d’en apprendre davantage sur nos activités verticales et de comprendre les tendances que les humains sont enclins à ignorer lorsqu’ils sont focalisés sur l’arbre qui dissimule la forêt.

Cependant, nous sommes encore loin de l’ère des directeurs généraux robotiques, et nous devons veiller à ce que les « décisions » prises par l’IA soient tempérées par des patrons humains, doués de bon sens et de la capacité de vérifier, de tester et de revenir en arrière. À l’avenir, l’IA et l’humanité travailleront de concert, mais, pour l’heure, il est sage de déployer l’IA avec prudence, avec des budgets raisonnables et avec un niveau d’engagement approprié. Nous devons surveiller attentivement le prochain succès que remportera DeepSeek, le remettre en question et toujours commencer par poser de bonnes vieilles questions concernant l’applicabilité, les coûts et les risques. Je note que le site web de DeepSeek arbore le slogan « Into the Unknown » (Vers l’inconnu). C’est à peu près vrai : nous devons conserver un esprit d’aventure et d’optimisme, tout en évitant de nous égarer au beau milieu d’un nouveau désert technologique.

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